On s’inquiète aujourd’hui de la manière dont notre industrie dispose de notre « environnement » planétaire. On s’interroge beaucoup moins sur la manière dont certains pans de « l’art contemporain » disposent du corps humain.
Albert Lichten – Buste romain à Champs-sur-Marne – 92×73 cm – 2004 –
huile sur toile
L’art contemporain n’est pas seulement une esthétique défendable sous certains aspects. Il sert aussi de machine de guerre dirigée contre ce que peut créer la peinture aujourd’hui.
Albert Lichten – Le grand tour (allégorie) – 92×73 cm – 2006 –
huile sur toile
L’invention (ou la réinvention) du signe par le cubisme a permis à Picasso de donner une force inédite à l’érotisme et au réalisme du corps féminin. Reste-t-il d’autres voies au peintre d’aujourd’hui pour exprimer sa vision d’un corps de femme ?
Albert Lichten -“ Lointaine – 73×60 cm – 2008 –
huile sur toile
Le peintre est plus proche du mime que du rhéteur, et la peinture est une mimesis avant d’être un langage.
Toute mimesis suppose trois ingrédients : généralité, particulier de l’exemple, métaphore.
La généralité, qui est l’élément de communicabilité de l’expérience expressive. Par elle, l’émetteur et le récepteur participent à une même expérience fondamentale. Or tout ce que l’oeil humain saisit peut s’ouvrir sur un imaginaire et se transcender pour devenir lumière.
La particularité, c’est-à-dire l’exemple, résulte du fait que la mimesis n’est pas une opération conceptuelle. « Il faut bien admettre que le désir de s’exprimer, à l’origine, nous vient bien de la chose vue » (Jean Fautrier)
La métaphore. Celle-ci est un saut qui fait miroiter l’inconnu entre deux termes connus ou perà§us, préservant le caractère d’énigme propre à la mimesis. L’exégèse de deux oeuvres de Cézanne, l’évocation de la peinture chinoise, illustrent la notion de métaphore picturale.
La bible nous parle encore, que nous soyons croyants ou non-croyants. La recherche d’une expression plastique exigeante des textes de l’Ancien Testament.
L’art du peintre comme toute forme d’acte poétique relève de la mimesis. La mimesis ne saurait être restreinte à l’imitation. Elle est mimique effectuée par le corps et l’esprit de l’artiste à partir d’éléments de réalité qu’elle ouvre à du sens. Elle est expression, c’est à dire ouverture et métamorphose… Elle met le corps du peintre et du spectateur en connivence avec la chose, elle embrasse et fait vivre son énigmatique surface…
En s’appuyant sur les réflexions de Platon et d’Aristote, en analysant deux œuvres picturales mais aussi la tragédie antique tout particulièrement éclairante à cet égard, l’objet du propos est d’appréhender l’importance de la mimesis dans la création artistique et de nous permettre d’ enrichir la relation que nous entretenons avec les œuvres d’art.
L’examen spécifique et approfondi de la mimesis picturale fera l’objet d’un prochain billet. Pour lire le billet cliquer ici